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Livres et apprentissages

Publication : (actualisé le )

Extraits de :

" Livres et Apprentissages à l’école "

CNDP collection SAVOIR LIVRE

Suivi d’une bibliographie à compléter...

Des livres pour le cycle des apprentissages fondamentaux

Dans les listes de livres proposés pour le cycle 1 ont été volontairement privilégiées les premières années de la maternelle (avant la grande section) et les premières rencontres avec le livre. Ont été repoussés vers le cycle 2 des ouvrages qu’on s’attendait à voir dévolus au cycle 1, parce que la longueur du texte, la complexité des références existentielles, culturelles, linguistiques grevaient certainement l’intérêt qu’ils pouvaient présenter, pour les manipulations et usages envisagés. Il faut laisser aux plus jeunes le temps de prendre leurs habitudes et leurs aises, de s’installer dans les livres découverts et d’en percevoir les suggestions. Ce qui ne veut pas dire textes pauvres pour le cycle 1, textes riches pour le cycle 2. Ce choix délibéré n’empêchait ni les incursions vers d’autres albums, ni les prolongements vers d’autres titres d’un même auteur(du texte ou des images). Les frontières entre les cycles sont faites pour être franchies, et ,plus que d’autres livres, les albums sont fait pour être relus, interrogés, redécouverts. Des albums pour les tout-petits peuvent être repris avec les plus grands. La liste des ouvrages proposés au cycle 1 constitue ainsi l’amorce d’un patrimoine commun.
Ces précautions étant prises, il faut rester également modeste, ne perdant pas de vue les situations habituelles de classe. La liste qui suit couvre les trois années, GS, CP, CE1, au cours desquelles s’opère la maîtrise des codes et des fonctionnement de la langue, au cours desquelles l’apprenti lecteur s’affranchit progressivement de la médiation des adultes pour s’engager dans l’épreuve de la compréhension autonome des textes. Trois années où les pressions sociales se font plus fortes encore, où les exigences de "savoir-lire", les représentations d’un apprentissage réussi de la lecture risquent de restreindre les choix, alors qu’il importe de maintenir ouvert l’éventail des occasions, des voies d’accès, des supports, des modes de lecture. S’il faut être conscient de l’évolution considérable qui conduit un enfant de la GS au CE1, on ne peut pas distribuer d’avance les ouvrages selon des critères d’âge, en gardant à l’esprit que la lecture peut s’effectuer, ou bien grâce à la médiation de l’adulte, ou bien par un accès direct au texte, et qu’à tout moment la relation peut s’établir, sous des formes variées, entre les histoires lues et racontées et leurs versions écrites.

Les Livres et les domaines disciplinaires du cycle 2

Accompagner avec les livres les domaines disciplinaires au cycle 2 suppose un certain nombre d’objectifs.

De la GS au CE1, chacun des enfants continue à construire sa propre parole pour donner sens à ses lectures personnelles et aux lectures communes de la classe. Parmi les activités de communication, les livres donnent l’occasion d’exercer l’aptitude à :

-écouter la voix de l’adulte qui lit et comprendre sa lecture ;
-présenter aux autres un album ;
-leur dire de quoi parle le livre ;
-en paraphraser et en reformuler la narration ;
-parler des personnages ;
-faire parler les personnages en situation de lecture théâtralisée ;
-explorer, à une étape donnée, les potentialités du récit, justifier les différentes hypothèses sous l’angle de leur cohérence avec ce qui précède et les confronter au texte et aux images ;
-revenir aux livres pour exprimer un point de vue ou argumenter son propos.

Autant d’occasions de faire naître la parole à l’intention du groupe et de favoriser l’écoute active de l’autre.

La lecture des livres accompagne la découverte du principe alphabétique et l’appropriation des règles conventionnelles qui régissent le langage écrit : la maîtrise des relations graphophonologiques nécessaires à l’automatisation du décodage phonologique, la reconnaissance des régularités syntaxiques et des formes de cohérence discursive nécessaires à la construction du sens des phrases et des textes.

Encore faut-il s’entendre sur le sens de "accompagner" : pour maîtriser ces correspondances graphophonologiques, il n’est pas utile de faire d’un album le support attitré d’apprentissages systématiques, au risque de ne plus voir dans le livre qu’un prétexte à leçons de lecture. Par exemples Chantefleurs et chantefables, de Robert Desnos, vaut tous les albums fabriqués pour les besoins d’une assonance. Plutôt donc que de coller au livre, il semble préférable de sélectionner dans un texte les unités travaillées par ailleurs, mais qui prennent là tout leur sens, de n’utiliser qu’un pan du livre pour réinvestir dans un contexte plus large des savoirs en cours d’acquisition. Cette sélection se révèle d’autant plus utile que les unités travaillées, ou les pans du livre choisis, constituent des entrées pertinentes dans la compréhension du livre, donnent des clés pour une lecture active de l’ensemble du livre.

Cet accompagnement permet de donner un écho intense, à ces apprentissages spécifiques en initiant à toutes les potentialités de la culture écrite, en découvrant ce que lire veut dire, les enjeux d’une lecture maîtrisée et les pouvoirs qu’elle donne : savoir et faire savoir, rire et faire rire, émouvoir, questionner, porter un jugement. L’enseignant reste le professionnel de la lecture, y compris dans ses aspects culturels, et non pas seulement dans ses apprentissages contraints.

On peut prolonger les moments de lecture par des activités d’écriture : apprendre à légender, à désigner un personnage, à donner un titre au chapitre lu, à faire un sommaire à partir d’images distribuées, à poursuivre un récit ou le transformer, à organiser une narration ou une explication, en retrouvant les repères temporels ou spatiaux utiles ou les connecteurs logiques indispensables, etc.

Les livres aident à la constitution de connaissances sur soi, sur les autres, à la découverte du monde. Au cycle 2, l’opposition que l’adulte fait entre documentaire et fiction relève de politiques éditoriales délibérées plus que de pratiques de classe bien établies ou de problématiques avancées par les enfants eux-mêmes. La distinction réel/imaginaire est néanmoins à construire, parce qu’elle est une clé nécessaire ouvrant à la prise de repères sûrs dans les domaines d’activités scientifiques progressivement installés et travaillés.

Les enfants se sensibilisent aux techniques mises en oeuvres dans l’illustration des albums : encre, aquarelle, gouache, crayon, craie, collage, photographie, ainsi qu’aux effets : trace, mouvement, lumière, flou, dégradé, aplat, et aux cadrages : plan rapproché, moyen, lointain, panoramique ou travelling. Ils s’exercent à quelques techniques rencontrées, ce qui permet de développer certaines habiletés manuelles, de constituer des références culturelles variées, mais aussi de susciter des questionnements, et de comprendre pourquoi telle technique a été retenue.

Des livres pour quels apprentissages ?

Si l’on tient compte des précautions rappelées plus haut, quelles aptitudes peut-on raisonnablement développer chez de jeunes enfants, de la GS au CE1, en mettant ces livres à portée de leur main, selon les occasions, les modes et les postures de lecture les plus variées ?

1-L’entrée dans les livres

Les enfants apprennent à manipuler des livres comme des objets de mieux en mieux connus. Ils les rapprochent et les distinguent selon des critères au départ empiriques et provisoires, progressivement ajustés.

Ils les rangent et les désignent en sachant mettre en relation les repères qu’ils se donnent et les classements normés.

Ils peuvent classer les livres avec quelque pertinence, à condition d’avoir fait l’expérience recommencée de ce que disent les livres, ceux auxquels s’appliquent des critères simples, facilement reconnus, ceux aussi qui croisent ces critères et sur lesquels il faut s’interroger.

Ils élaborent des instruments collectifs pour conserver des traces des livres lus.

2-L’entrée dans les textes

Les enfants apprennent à maîtriser le sens conventionnel de la lecture, c’est à dire de haut en bas, d’une page à l’autre, mais aussi d’une colonne à l’autre, d’un chapitre à l’autre, d’un texte à l’autre, comme dans ces ensembles polymorphes que sont les ouvrages documentaires.

Ils se servent des repères de typographie, de mise en page, de calligraphie...comme d’éléments participant à la signification, pour explorer la diversité et les enjeux du monde des écritures.

La confrontation avec les livres permet de réfléchir aux difficultés de lecture de manière plus intelligente, parce qu’en prise avec la diversité des textes, et donne un sens à une première opposition entre les régimes de fonctionnement des textes (la narration, la description, l’explication), un des fils conducteurs des apprentissages. Les résultats des évaluations nationales CE2 mettent en évidence de grandes lacunes chez les enfants à propos de ces savoirs et savoir-faire.

3- Le monde réel et les mondes imaginaires

Les enfants affinent les distributions à l’intérieur des catégories fondamentales du réel et de l’imaginaire.

Ils apprennent à distinguer, à partir d’indices construits par eux, les fictions représentant le monde réel et celles évoquant des mondes imaginaires.

Ils explorent le monde familier, la mise en scène de la vie quotidienne, dans la diversité de ses représentations, mais aussi les mondes imaginaires ou lointains.

Ils explorent aussi les zones d’incertitude et de conflit, lorsque la mise en scène du rêve s’inscrit dans une intention apparemment réaliste, lorsqu’un motif comme la métamorphose bouleverse le rapport du personnage au monde qui l’entoure.

Comment classer par exemple un album qui met en scène un mélange subtil de références à l’univers familial de l’auteur et au monde des personnages inventés, gommant les frontières apparemment les mieux établies entre la fiction et la réalité ?

4-La fiction et la documentation

Les enfants commencent à reconnaître l’habillage narratif du documentaire et les apport de documentation dans la fiction.

Ils apprennent à manier conjointement le récit et les premiers ouvrages documentaires ou encyclopédiques adaptés à cet âge pour confronter les renseignements recherchés.

Ils se familiarisent avec les différents modes de traitement des données et les formes textuelles qui en découlent : informations, explicites ou implicites, continuité ou discontinuité, éclatement ou linéarité, structuration forte ou lâche, fonctionnement alterné ou juxtaposé du récit et de l’explication.

Il y a des documentaires fort bien informés qui jouent sciemment sur une mise en scène anthropomorphique, pour rapprocher les faits évoqués des représentations enfantines, prêtant par exemple aux animaux décrits des comportements calqués sur ceux des êtres humains. Ce principe pédagogique est cher à l’école du Père Castor, tout particulièrement dans sa collection "le Roman des Bêtes". Ainsi dans Plouf, canard sauvage, Plumette "regarde tendrement ses huit oeufs..." et dans Froux le lièvre, celui-ci rencontrant Capucine, "une charmante demoiselle lièvre", est "tout ému de se trouver en présence d’une personne de son espèce". De plus les enfants comprendront d’autant mieux le rôle et le fonctionnement d’un sommaire qu’ils en auront eux-même fabriqué, fût-ce à partir de Froux le lièvre, de ses métaphores et de ses dialogues animaliers.

5- Le lexique

Les enfants s’engagent dans un travail continu sur le lexique, non seulement pour constituer un capital lexical ("trésors" de mots étranges ou scripts issus du quotidien) mais surtout pour apprécier la valeur de chaque terme en relation aux contextes dans lesquels ils s’inscrit.

Ils comprennent que les mots ne sont pas des unités isolées, mais qu’ils sont pris dans le fonctionnement de la langue. Ainsi le mot "lune" n’a pas le même sens dans un ouvrage de fiction et dans un texte documentaire ; le "grand nord" peut relever d’un univers fictionnel au cycle 1, alors qu’il commence à appartenir à un espace géographique lointain au cycle 2. Ils observent que les mots, dans leurs récurrences et insistances, sont aussi des organisateurs du texte. Travailler le vocabulaire suppose d’abord que l’on fréquente les dictionnaires-depuis ceux fabriqués pour les enfants, avec leurs définitions et leurs illustrations tautologiques, jusqu’aux usuels les plus traditionnels. Mais aussi que, par les activités de lecture/relecture/écriture suggérées plus haut, on cherche constamment à articuler les mots aux contextes, à reconstituer les trames des discours. Il peut s’agir de situations de production de parole, lorsqu’on commente de grandes images animalières, et qu’on a besoin du lexique du mouvement pour évoquer les panoramiques dessinés. Il peut s’agir de suivre les traces d’un personnage dans un récit : ses différentes dénominations, les marques linguistiques de son rôle dans le texte.

Il peut s’agir aussi de créer les rubriques d’une recherche autour des caractéristiques d’un animal (quels sont ses amis ? ses ennemis ? comment nomme-t-on ses petits ?...) et d’en ordonner la présentation.

6-La dynamique et la cohérence du texte

Les enfants prennent conscience de la dynamique et de la cohérence d’une histoire ou d’une explication.

Ils explorent la notion de temps, l’avant et l’après d’un évènement, la simultanéité ou la succession de plusieurs actions.

Ils apprennent à vérifier qu’une progression, inscrite dans des images et dans des éléments textuels, met en mouvement un système d’échos, mais aussi fait jouer des fonctions précises, essentielles, aux éléments textuels : fonction d’ancrage, de resserrement des potentialités de l’image, fonction de relais, d’orientation, de mise en perspective de ce qui est donné à voir.

Ils s’habituent au maniement des connecteurs, des organisateurs textuels, traduction en mots de marquages de plus en plus complexes (le lieu, l’époque, la cause...), de références de plus en plus élaborées dans le temps et dans l’espace (passé récent, passé plus lointain, espaces familiers, espaces exotiques...)

Ils démêlent l’inscription dans un temps historique et les temporalités indéterminées du conte.

Ils apprennent à faire intervenir leurs connaissances préalables, les suggestions des images, pour expliciter les relations entre les informations.

Ils entrent dans la tâche d’élaboration d’inférences qui incombe à tout lecteur, pour élucider au besoin les implicites du texte.

7-Le personnage

Les enfants s’approprient la notion de personnage à travers ses récurrences, sa permanence, ses modalités d’insertion dans l’histoire, sa fonction dans la construction d’un récit cohérent.

Ils savent le reconnaître (dans le texte et dans l’image), l’identifier et le nommer, à travers les reprises nominales et pronominales, les marques anaphoriques, plus ou moins proches, plus ou moins affichées qui le désignent, à travers aussi des modes d’énonciation différents (qui dit : "je" ? de qui dit-on "il" ou "elle" ?).

ILs savent reconnaître, d’une histoire à l’autre, un même personnage et l’inscrire dans une série.

Ils s’interrogent sur la proximité ou la distance du personnage à eux-mêmes. Ils jouent des sentiments d’identité ou d’altérité ; ils s’identifient au besoin à lui ; ils apprécient le rôle qu’on lui fait jouer.

8-Le système des personnages

Les enfants, passant du personnage au système des personnages (personnages de premier plan, personnages de second rang), expérimentent les relations et les hiérarchies instituées par l’histoire (les couples, les groupes de personnages, les rapports familiaux, sociaux...) et les distributions de rôle (les bons et les méchants, les téméraires et les prudents, les rusés et les crédules...) en maintenant ouverte la possibilité de se tromper ou de s’interroger, de revoir son jugement.

Ils apprennent à retrouver ces personnages soit comme archétypes du réel ou de l’imaginaire, soit comme personnages d’une série, et à réévaluer ces relations, maintenues, modifiées, transformées, dans d’autres histoires.

Ils approchent ainsi la fonction symbolique, telle qu’elle se donne à lire par exemple, discrètement, dans de nombreux albums.

Dans la durée du cycle 2, la progression des apprentissages ne tient pas seulement à la longueur des textes lus, mais aussi à la complexification des narrations, et donc à l’attention qu’il faut porter aux marques linguistiques, au traitement des anaphores qui organisent le système des personnages. Rien ne doit être laissé au hasard, il faut que le lecteur lève les ambiguïtés avant que ne s’installent les confusions.

9-L’énnonciation

Les enfants s’initient aux modalités de l’énonciation, à ses jeux, ses séductions et ses pièges.

Ils apprennent à se poser les questions décisives : qui parle ? où est situé le narrateur ? quelle place a-t-il dans l’espace et dans le temps ? qui voit ce plan large ou ce gros plan que l’on montre ?

Ils approchent ainsi des notions d’échelle, de relativité des grandeurs.

Ils appréhendent, par ce biais encore, la distinction entre réel et imaginaire.

Dans le texte documentaire, l’hétérogénéité de l’énonciation peut être source de difficulté : "qui parle ?" signifie également "qui affirme ?""qui m’impose ses émotions ?". Il faut donc apprendre à démêler opinion et assertion vérifiée, et entamer un travail de conceptualisation qui se poursuivra au cycle 3.

10-Les constructions narratives

Les enfants se familiarisent avec la diversité des constructions narratives :
-récits linéaires avec évènements déclencheurs ;
-récits aux épisodes répétitifs ;
-récits de type "randonnée" procédant par accumulation ;
-récits simultanés ;
-récits à emboîtements simples.

Ils sont sensibles à l’évènement dramatique, qui crée la rupture ("tout à coup") ; ils prêtent attention à la chute, à la clôture du récit ; ils savent retrouver les étapes de celui-ci et les effets de la narration.

11- La mise en page, la mise en image

Les enfants se familiarisent avec la lecture des images : même s’il est impossible de séparer textes et images, la lecture de celles-ci constitue un apprentissage spécifique. Ils apprennent à apprécier les aspects techniques de leur réalisation, mais aussi à découvrir "du sens" dans l’orientation gauche/droite, haut/bas, extérieur/intérieur, dans le choix du noir et blanc ou de la couleur, dans le rapport entre l’illustration et le texte, dans l’occupation de l’espace de la page, de la double page, dans la complémentarité ou la redondance ou les distorsions entre ce que dit le texte et ce que montre l’image.

12- La parole justifiée

Les enfants explorent le domaine de la discussion, du partage des émotions (peur, rire, attente, surprise), de l’échange des opinions, à l’occasion d’un mot qu’on ne comprend pas ou d’une situation qu’on ne supporte pas...A partir de quoi se construisent des jugements plus assurés, des appréciations mieux motivées, parce qu’on relance la lecture. On retourne au livre pour retrouver les justifications utiles, on se ressource à tout ce qu’on a fait avant (personnages, narrations, espaces explorés...), on s’inscrit dans un contexte plus large, dans un réseau plus ample, qui renforce ou nuance les opinions, conforte ou fait prendre distance, renvoie en tout cas à d’autres éléments de réponse, à d’autres livres.

Des livres dans quelles situations ?

Médiation de l’enseignant ou accès direct au texte sont les deux situations envisagées au départ. En fait, il est possible de nuancer davantage, de distinguer les situations où l’enseignant, dans la classe, lit aux enfants, celles où il lit avec eux, celles où il leur donne à lire, celles où les enfants prennent l’initiative de la lecture...

Les modes d’appropriation des livres dans la classe dépendent à l’évidence du nombre des élèves, des supports choisis, de la distance entre chaque enfant et le texte : tous les livres n’ont pas le grand format des albums de la collection " les bottes de sept lieues" chez Gallimard, tous ne font pas défiler leur histoire en grande images dans un cadre en forme de petit théâtre, comme des Kamishibaï.

C’est pourquoi il semble important de diversifier les modes d’appropriation du texte par les enfants et les tâches proposées, de rompre avec le modèle dominant : un texte/un maître/des élèves/un mode de lecture, et de tendre, en ouvrant la palette des occasions d’interaction, vers cette autre configuration : des textes/un maître/des élèves/des modes de lecture.

Sans prétendre dresser une typologie exhaustive, on peut distinguer différentes situations :

des situations de lecture entre pairs, qui supposent :
-l’album en plusieurs exemplaires mis dans les mains des élèves ;
-l’album sous diverses formes mis à la disposition de la classe : l’album classique, l’album au format poche, l’album au format géant, l’album adapté en cassette audio et /ou vidéo, le livre cédérom, le livre animé ;
-une médiation, c’est à dire un enseignant qui favorise les échanges, qui suscite une lecture attentive, qui interroge la mise en relation du détail avec l’ensemble...

des situations de lecture magistrale et dialoguée au cours desquelles l’enseignant :
-s’appuie sur les observations des jeunes lecteurs, sur leurs émotions ;
-les interroge de manière ouverte, à l’écoute de leur réception ;
-transmet l’objet textuel au fur et à mesure des découvertes, tout en réservant des surprises ;
-souligne la complexité et la richesse de la relation texte/images/typographie ;
-relève l’énigme du détail ou de la clôture de l’album ;
-dépasse l’oralisation expressive de l’histoire.

des situations de lecture individuelle, prévues dans l’emploi du temps de la classe, pour des moments de lecture personnelle d’albums : non seulement pendant l’accueil, mais aussi sous la forme d’ateliers pour les trois niveaux du cycle. Les élèves y apprennent la nécessaire activité solitaire d’exploration du livre dans le silence et la patience attentive.

des situations de lecture contée ou racontée par l’enseignant lui-même ou, à l’occasion, par un conteur professionnel.

des situations de lecture théâtralisée, qui peuvent avoir deux visées :
-l’adaptation d’un texte, sa mise en scène par les élèves eux-mêmes de la classe ou du groupe scolaire, en collaboration éventuellement avec une compagnie d’acteurs professionnels ;
-de façon plus quotidienne, la mise en jeu d’un fragment d’album, comme occasion de s’interroger sur le fonctionnement d’un texte, sur les effets inscrits dans ce texte, comme aide à la compréhension.

La médiation de l’enseignant peut ainsi prendre des formes multiples :
-une restitution fidèle du texte écrit, qui conduit à une relecture ultérieurement par les apprentis lecteurs ;
-une adaptation maîtrisée du texte original, qui se donne pour objectif le retour au texte, mais laisse ouvertes les démarches d’appropriation d’une histoire dont on connaît l’essentiel du scénario ;
-un dialogue autour de la forme album, exploitant les ressources du dispositif textuel et celles des images, comme une invitation à l’ajustement d’hypothèses, de reformulations acceptables, à la restitution littérale et complète ou à l’amorce d’une lecture ultérieure...

La confrontation des apprentis lecteurs avec des textes peut alors se traduire en tâches individuelles partagées, préparées ou spontanées, introduites par des amorces ou en accès direct. Elle peut se faire sur des supports identiques pour tous les élèves de la classe ou sur des supports différents. Elle peut amener à des lectures comparées (traitement d’un même personnage dans plusieurs albums, comparaison des versions d’un même conte...). Elle peut conduire à des mises en commun de conclusions partielles, à des allers et retours d’un groupe à l’autre, à des confrontations et des mises au point, à des activités d’écriture.

Les rencontres avec les livres deviennent ainsi des lectures partagées. Aux enseignants de faire en sorte qu’il y ait aussi du jeu, du rire, de l’étonnement, du plaisir et de l’émotion en partage, avec l’envie de donner son opinion, de la justifier et de convaincre les autres.

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